N'en jetons presque plus ! Trions, reprenons, détournons.
L'essentiel est presque bien dit et redit, en long, en large...
Reprenons serré, de travers, à travers.
Par les moyens d'avenir du présent. Pour le présent de l'avenir.
(OTTO)KARL

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2009-11-09

« pro » personnel

Il existe un certain point culminant de la vie : lorsque nous l'avons atteint, malgré notre liberté et quoi que nous déniions au beau chaos de l'existence toute raison providentielle et toute bonté, nous sommes encore une fois en grand danger de servitude intellectuelle et nous avons à faire nos preuves les plus difficiles. Car c'est maintenant seulement que notre esprit est violemment envahi par l'idée d'une providence person­nelle, une idée qui a pour elle le meilleur avocat, l'apparence évidente, maintenant que nous pouvons cons­tater que toutes, toutes choses qui nous frappent, tournent toujours à notre avantage. La vie de chaque jour et de chaque heure semble vouloir démontrer cela toujours à nouveau; que ce soit n'importe quoi, le beau comme le mauvais temps, la perte d'un ami, une maladie, une calomnie, la non-arrivée d'une lettre, un pied foulé, un regard jeté dans un magasin, un argument qu'on vous oppose, le fait d'ouvrir un livre, un rêve, une fraude : tout cela nous apparaît, immédiatement, ou peu de temps après, comme quelque chose qui « ne pouvait pas ne pas se produire », - quelque chose qui est plein de sens et d'une profonde utilité, précisément pour nous. Y a-t-il une plus dangereuse séduction que de retirer sa foi aux dieux d'Epicure, ces insouciants inconnus, pour croire à une divinité quelconque, soucieuse et mesquine, qui connaîtrait personnellement chaque petit cheveu sur notre tête et que les services les plus détestables ne dégoûte­raient point? Eh bien! -je veux dire : malgré tout cela, -laissons en repos les dieux et aussi les génies serviables, pour nous contenter d'admettre que maintenant notre habileté, pratique et théorique, à interpréter et à arranger les événements atteint son apogée. Ne pensons pas non plus trop de bien de cette dextérité de notre sagesse, si nous sommes parfois surpris de la merveilleuse harmonie que produit le jeu de notre instrument : une harmonie trop belle pour que nous osions nous l'attribuer à nous-mêmes. En effet, de-ci de-là, quelqu'un joue avec nous - le cher hasard : à l'occasion, il nous conduit la main et la providence la plus sage ne saurait imaginer de musique plus belle que celle qui réussit alors sous notre folle main.
(F.N. — GS§277)