Est-ce que la nuit ou le jour donne plus de réponse que le jour ou la nuit ? (...)
Eh oui, pourquoi la mort nous serait-elle un moment d'apocalypse (au sens dernier et premier), qui nous éteindrait ou nous éclairerait sur quoi que ce soit ? Ne pourrait-on pas concevoir qu'elle nous soit un prolongement de délire, ou le passage d'un délire à l'autre inspiré du précédent ? À l'image de la veille au rêve et du rêve à la veille. (...) Après tout, nos rêves nocturnes eux-mêmes ne sont-ils pas directement nourris de nos délires éveillés, et réciproquement ? Et à laquelle de ces réalités doit-on adhérer puisqu'on en alterne sans cesse ?
(...)
En bref, la mort ne s'avère peut-être pas la coupure radicale qu'on croit (ou nous fait croire), qui nous ferait basculer soit dans le néant (...) soit dans quelque révélation (...). [La mort n'est peut-être finalement ni le temps ni le lieu d'aucune extinction radicale ni de quelque révélation que ce soit. Voilà mon idée.]
Ce que je voulais dire l'autre jour, et disais effectivement à qui pouvait l'entendre pour avoir soi-même intimement dépassé (ou très vaguement intuitionné le dépassement possible de) ces deux croyances obtuses, ces deux dogmes qui s'affrontent encore aujourd'hui (...) c'est que : peut-être bien que le mystère de l'existence se prolonge jusqu'au coeur de ladite mort, sans révélation ni extinction complète, mais au contraire continuation du délire, autant personnel que collectif, et collectif à force de communion des délires personnels. (...) À l'instar de notre situation ici-même. Alors oui, un paradis ou un enfer, et tous leurs intermédiaires surtout, mais selon une tout autre conception. (...) D'une fondation d'objectivité par confluence chorale massive des délires objectivo-subjectifs. Bon, je sais pas si je suis très clair, mais je paresse à développer, là. (...)
En tout cas, peut-être ne plus concevoir la mort comme une coupure absolue, par une chute au néant ou une entrée dans quelque arrière-monde prédéfini, objectif... (...)
Aujourd'hui je vois ça comme un dogmatisme contre un autre, une foi contre une autre. Ni plus ni moins. (...) Et comme je disais encore à [untelle] avant-hier, sur la question de savoir si je crois à une vie après la mort : je ne crois plus « rien », a priori, pas plus à la vie après la mort qu'à la mort après la vie. C'est-à-dire, ni à l'une ni à l'autre de ces croyances, qui ne sont guère que cela – n'en déplaise à l'une d'elle.
(...)
(O.K.)
Rien, c'est trop peu; Dieu, ce serait trop.
(J.R.)
cf. d'un songe à l'autre, à l'autre... ?
Eh oui, pourquoi la mort nous serait-elle un moment d'apocalypse (au sens dernier et premier), qui nous éteindrait ou nous éclairerait sur quoi que ce soit ? Ne pourrait-on pas concevoir qu'elle nous soit un prolongement de délire, ou le passage d'un délire à l'autre inspiré du précédent ? À l'image de la veille au rêve et du rêve à la veille. (...) Après tout, nos rêves nocturnes eux-mêmes ne sont-ils pas directement nourris de nos délires éveillés, et réciproquement ? Et à laquelle de ces réalités doit-on adhérer puisqu'on en alterne sans cesse ?
(...)
En bref, la mort ne s'avère peut-être pas la coupure radicale qu'on croit (ou nous fait croire), qui nous ferait basculer soit dans le néant (...) soit dans quelque révélation (...). [La mort n'est peut-être finalement ni le temps ni le lieu d'aucune extinction radicale ni de quelque révélation que ce soit. Voilà mon idée.]
Ce que je voulais dire l'autre jour, et disais effectivement à qui pouvait l'entendre pour avoir soi-même intimement dépassé (ou très vaguement intuitionné le dépassement possible de) ces deux croyances obtuses, ces deux dogmes qui s'affrontent encore aujourd'hui (...) c'est que : peut-être bien que le mystère de l'existence se prolonge jusqu'au coeur de ladite mort, sans révélation ni extinction complète, mais au contraire continuation du délire, autant personnel que collectif, et collectif à force de communion des délires personnels. (...) À l'instar de notre situation ici-même. Alors oui, un paradis ou un enfer, et tous leurs intermédiaires surtout, mais selon une tout autre conception. (...) D'une fondation d'objectivité par confluence chorale massive des délires objectivo-subjectifs. Bon, je sais pas si je suis très clair, mais je paresse à développer, là. (...)
En tout cas, peut-être ne plus concevoir la mort comme une coupure absolue, par une chute au néant ou une entrée dans quelque arrière-monde prédéfini, objectif... (...)
Aujourd'hui je vois ça comme un dogmatisme contre un autre, une foi contre une autre. Ni plus ni moins. (...) Et comme je disais encore à [untelle] avant-hier, sur la question de savoir si je crois à une vie après la mort : je ne crois plus « rien », a priori, pas plus à la vie après la mort qu'à la mort après la vie. C'est-à-dire, ni à l'une ni à l'autre de ces croyances, qui ne sont guère que cela – n'en déplaise à l'une d'elle.
(...)
(O.K.)
Rien, c'est trop peu; Dieu, ce serait trop.
(J.R.)
cf. d'un songe à l'autre, à l'autre... ?
Combien de fois m’est-il arrivé de songer la nuit, que j’étois en ce lieu, que j’étois habillé, que j’étois auprès du feu, quoique je fusse tout nu dedans mon lit ! Il me semble bien à présent que ce n’est point avec des yeux endormis que je regarde ce papier ; que cette tête que je branle n’est point assoupie ; que c’est avec dessein et de propos délibéré que j’étends cette main, et que je la sens : ce qui arrive dans le sommeil ne semble point si clair ni si distinct que tout ceci. Mais, en y pensant soigneusement, je me ressouviens d’avoir souvent été trompé en dormant par de semblables illusions ; et, en m’arrêtant sur cette pensée, je vois si manifestement qu’il n’y a point d’indices certains par où l’on puisse distinguer nettement la veille d’avec le sommeil, que j’en suis tout étonné ; et mon étonnement est tel qu’il est presque capable de me persuader que je dors.
RépondreSupprimer(René Descartes)
Et si nous étions, comme Alice, de l'autre côté du miroir ? Descartes renonce à l'argument de la folie, mais celle-ci est tout de même intégrée sous une autre forme, celle du rêve, qui est aussi une figure de la déraison. Le rêve est tout aussi extravagant que la folie. L'argument consiste à éveiller le soupçon d'une possible confusion entre le rêve et la réalité. Certes, le rêve est plus confus que la réalité. Mais, pendant que je rêve, je crois fermement que mon songe est réel. Au moment où je le vis, le rêve se présente comme réel, même si après coup je peux découvrir qu'il était imaginaire. Le rêve se donne pour réel, au point qu'au réveil, il arrive de douter qu'on ait simplement rêvé. L'illusion produite par le rêve est puissante, sans quoi le cauchemar ne serait pas si terrifiant. On manque de critères pour distinguer avec assurance la veille du sommeil. Par conséquent, la vie elle-même ne serait-elle pas un rêve? Ce que je crois percevoir: et si, en réalité, je ne faisais que l'imaginer? Et si le monde était mon rêve? Dans le sommeil, j'ai des sensations qui ne renvoient à aucune réalité présente; et s'il en allait de même à l'état de veille? Il ne me suffit pas de me pincer pour m'assurer que je ne rêve pas: il peut bien arriver que l'on éprouve une douleur en rêve. Le monde pourrait bien ne pas être tel que je le vois. Et c'est justement le cas: l'herbe n'est pas verte: la couleur n'est qu'un effet de la lumière sur notre système sensoriel; la couleur est relative à notre système perceptif. Une autre espèce perçoit le monde autrement. Le ciel n'est pas bleu. La couleur bleue ne lui appartient pas, elle n'est qu'une qualité seconde, résultant de la présence de vapeur d'eau, dans l'atmosphère, qui réfracte la lumière du soleil. D'ailleurs, le soir, le ciel tourne au rouge. Le monde pourrait même ne pas exister du tout, se dit Descartes. Quand je perçois un objet, je crois qu'un objet réel est cause de ma perception; tandis que quand je l'imagine, c'est moi seul qui construis une image. La perception pourrait être semblable à l'imagination, sans corrélat extérieur. Ce thème de la confusion entre le rêve et la réalité est classique, c'est presque un lieu commun à l'époque de Descartes. L'écrivain espagnol Calderòn, notamment, a écrit la Vie est un songe. Ce sujet a été repris par Borgès, dans son récit les Ruines circulaires, où le personnage se rend compte qu'il n'est que le rêve d'un autre. Ceux qui trouvent ce sujet improbable se sont peut-être pourtant pris au jeu du film Matrix[Note]. Rappelons encore que Descartes ne veut pas nous convaincre que nous vivons dans un monde d'illusion; le scepticisme n'est pour lui qu'une étape. Mais la possibilité de cette illusion pourtant bien ordinaire qu'est le rêve est inquiétante: elle met en question la fiabilité de la connaissance sensible dans son ensemble - y compris des sensations qui se rapportent aux objets les plus proches, comme mon propre corps. L'argument du rêve est redoutable, car il met en question la connaissance sensible dans son ensemble, même dans les situations les plus quotidiennes. Et l'on ne peut pas l'écarter comme l'argument de la folie; car le rêve est une hallucination normale. L'argument de Descartes peut sembler extravagant, mais peut-on prouver que l'on ne rêve pas toujours? Si ce n'est pas possible, alors le doute est permis.
RépondreSupprimer(?)
On connaît le célèbre apologue chinois : Tchouang-tseu rêve qu'il est un papillon, mais n'est-ce point le papillon qui rêve qu'il est Tchouang-tseu ? De même dans ce roman, est-ce le duc d'Auge qui rêve qu'il est Cidrolin ou Cidrolin qui rêve qu'il est le duc d'Auge ?
RépondreSupprimer(Raymond Queneau)
L'athéisme, insupportable, des vrais athées consiste à ne croire en rien ni même, disait Péguy, à l'athéisme.
RépondreSupprimer(Y.M)
http://blog.elle.fr/la-vraie-vie-de-fonelle/files/2010/10/IMG_1838-768x1024.jpg
RépondreSupprimerL'envie, le rêve,"la vie privée, ce n'est pas ce qu'on fait, c'est ce qu'on ne fait pas" S.F.
RépondreSupprimerQuoi qu'il en soit j'espérais, constance, que cet article vous fasse méditer. Vous qui, au moins dernièrement dans le cadre de votre blog, affichez l'athéisme radical et militant d'un michel onfray. Or, cet athéisme-là, n'est-ce pas là aussi, là encore, la violence d'une autre croyance contre une autre encore ? Si je partage ( et participe à ) cet athéisme de combat contre un dieu moral, « humain trop humain », anthropo-logique ®, celui de nos religions par exemple, le mien, de combat, s'arrête là, sans plus de prétention métaphysique, laissant alors ouverte l'hypothèse d'une divinité cosmo-logique ®, sur laquelle, par mon sort actuel, il n'est pas de mon ressort de statuer – sinon pour m'amuser. « Tous les jours j'accrois la liste des choses dont je ne parle plus. Le plus philosophe est celui dont la liste est la plus longue. » (C.) À bonne entendeuse ?
RépondreSupprimerJ'affiche parce que je banquette mais je m'arrête à l'entrée, peut-être même à l'apéritif. Ne serait-ce pas légèrement prétentieux de dire "je sais" ?
RépondreSupprimerhttp://banquetonfray.over-blog.com/article-etienne-klein-et-son-origine-de-l-univers-64570625.html
http://banquetonfray.over-blog.com/article-hubert-reeves-l-univers-a-t-il-un-sens-73670077.html
Pré-tentieux, je vous le fais (presque) pas dire. Bien que je n'aie rien contre la prétention par ailleurs, et par principe. Au contraire. Du moins, à l'entendre au sens d'autorevendication, disons.
RépondreSupprimerEt je reprends le fil de mes COMPLÉMENTAIRES :
RépondreSupprimerLa mort c'est la [«] finale [» ?] ; le sommeil, son entraînement.
(O.)
Rien, c'est trop peu; Dieu, ce serait trop.
RépondreSupprimer(J.R.)
Peu de gens sont dignes de ne croire à rien.
RépondreSupprimer(J.R.)