À Anne-Lise, voisine d'ascèse.
Car la vérité, pour les philosophes grecs ou romains, n'est pas seulement à connaître, elle est aussi à vivre. Voilà leur dénominateur commun.
En grec ancien, il n'existe qu'un seul mot, sophos, pour désigner à la fois « le sage » et « le savant ». Entre celui qui possède des connaissances et celui qui transforme son existence à partir d'elles, la distinction n'est pas possible, même du strict point de vue linguistique.
Ainsi le « savant fou », image habituelle pour nous de la science-fiction, est une impossibilité dans l'horizon de la pensée antique. Celui qui détient des connaissances doit en être moralement transformé. Le savoir n'est pas moralement neutre. Il n'est jamais tout à fait détacher d'un horizon existentiel.
Tout savoir est aussi un savoir-vivre. Toute forme d'existence transformée par une intention philosophique implique la présence d'un savoir et la mise en oeuvre d'une pratique. C'est ce qu'il faut d'abord comprendre.
(...)
La première chose à garder en tête en parlant des écoles philosophiques de l'Antiquité est donc qu'elles ne se limitent pas à une activité théorique, conceptuelle et intellectuelle. Elles conservent continûment une visée pratique, une volonté de transformer le caractère autant que la réflexion. Quelles que soient leurs différences, leur but commun consiste à vouloir assurer le bonheur par une transformation conjointe de la pensée et de la manière de vivre. Il ne s'agit jamais de pure spéculation mais toujours d'une patiente, lente et régulière métamorphose vers la sagesse.
Certes, ce travail repose toujours sur une analyse intellectuelle, sur la vision claire de points de doctrine aperçus par la raison. Pour entrer dans la pratique, la compréhension doit ensuite s'accompagner d'un véritable entraînement quotidien. Il se désigne en grec par le mot « aïskèsis ». Ce terme a donné en français « ascèse », mais il ne signifie pas forcément, dans l'Antiquité, une pratique austère. Dans notre vocabulaire, l'ascèse évoque le fait de se dépouiller de nombre d'agréments, que l'on délaisse par souci de se mortifier. Il vaut mieux entendre, dans le « aïskèsis », l'idée d'exercice. Exercice spirituel ou exercice tout court, entraînement. L'aïskèsis est un entraînement quotidien pour se modifier, transformer son existence, ne plus être soumis à des variations d'émotion, ne plus être entraîné par des désirs débridés.
Le but est de « calmer la tempête de l'âme ». Les diverses écoles philosophiques sont toutes habitées par une même volonté d'aller vers plus de sérénité, vers l'absence de trouble, vers la permanence de l'équilibre interne. Mais il existe, évidemment, des distinctions majeures dans les voies préconisées.
(R.-P.D.)
cf. l'éthique philosophique
cf. anti(quitter la) philosophie moderne
cf. attitude philosophique universelle
cf. karl, 37eme philosophe
cf. k.abbale
Car la vérité, pour les philosophes grecs ou romains, n'est pas seulement à connaître, elle est aussi à vivre. Voilà leur dénominateur commun.
En grec ancien, il n'existe qu'un seul mot, sophos, pour désigner à la fois « le sage » et « le savant ». Entre celui qui possède des connaissances et celui qui transforme son existence à partir d'elles, la distinction n'est pas possible, même du strict point de vue linguistique.
Ainsi le « savant fou », image habituelle pour nous de la science-fiction, est une impossibilité dans l'horizon de la pensée antique. Celui qui détient des connaissances doit en être moralement transformé. Le savoir n'est pas moralement neutre. Il n'est jamais tout à fait détacher d'un horizon existentiel.
Tout savoir est aussi un savoir-vivre. Toute forme d'existence transformée par une intention philosophique implique la présence d'un savoir et la mise en oeuvre d'une pratique. C'est ce qu'il faut d'abord comprendre.
(...)
La première chose à garder en tête en parlant des écoles philosophiques de l'Antiquité est donc qu'elles ne se limitent pas à une activité théorique, conceptuelle et intellectuelle. Elles conservent continûment une visée pratique, une volonté de transformer le caractère autant que la réflexion. Quelles que soient leurs différences, leur but commun consiste à vouloir assurer le bonheur par une transformation conjointe de la pensée et de la manière de vivre. Il ne s'agit jamais de pure spéculation mais toujours d'une patiente, lente et régulière métamorphose vers la sagesse.
Certes, ce travail repose toujours sur une analyse intellectuelle, sur la vision claire de points de doctrine aperçus par la raison. Pour entrer dans la pratique, la compréhension doit ensuite s'accompagner d'un véritable entraînement quotidien. Il se désigne en grec par le mot « aïskèsis ». Ce terme a donné en français « ascèse », mais il ne signifie pas forcément, dans l'Antiquité, une pratique austère. Dans notre vocabulaire, l'ascèse évoque le fait de se dépouiller de nombre d'agréments, que l'on délaisse par souci de se mortifier. Il vaut mieux entendre, dans le « aïskèsis », l'idée d'exercice. Exercice spirituel ou exercice tout court, entraînement. L'aïskèsis est un entraînement quotidien pour se modifier, transformer son existence, ne plus être soumis à des variations d'émotion, ne plus être entraîné par des désirs débridés.
Le but est de « calmer la tempête de l'âme ». Les diverses écoles philosophiques sont toutes habitées par une même volonté d'aller vers plus de sérénité, vers l'absence de trouble, vers la permanence de l'équilibre interne. Mais il existe, évidemment, des distinctions majeures dans les voies préconisées.
(R.-P.D.)
cf. l'éthique philosophique
cf. anti(quitter la) philosophie moderne
cf. attitude philosophique universelle
cf. karl, 37eme philosophe
cf. k.abbale
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