N'en jetons presque plus ! Trions, reprenons, détournons. L'essentiel est presque bien dit et redit, en long, en large... Reprenons serré, de travers, à travers. Par les moyens d'avenir du présent. Pour le présent de l'avenir. (OTTO)KARL
Extrait : Célèbre, Elstir ne l’était peut-être pas encore à cette époque tout à fait autant qu(...)'il le fut d’ailleurs bien peu d’années plus tard. (...) Mais un grand talent, même quand il n’est pas encore reconnu, provoque nécessairement quelques phénomènes d’admiration (...) Il prodigua pour moi une amabilité, qui était aussi supérieure à celle de Saint-Loup que celle-ci à l’affabilité d’un petit bourgeois. A côté de celle d’un grand artiste [Elstir], l’amabilité d’un grand seigneur [Saint-Loup], si charmante soit-elle, a l’air d’un jeu d’acteur, d’une simulation. Saint-Loup cherchait à plaire, Elstir aimait à donner, à se donner. Tout ce qu’il possédait, idées, oeuvres, et le reste qu’il comptait pour bien moins, il l’eût donné avec joie à quelqu’un qui l’eût compris. Mais faute d’une société supportable, il vivait dans un isolement, avec une sauvagerie que les gens du monde appelaient de la pose et de la mauvaise éducation, les pouvoirs publics un mauvais esprit, ses voisins, de la folie, sa famille de l’égoïsme et de l’orgueil. Et sans doute les premiers temps avait-il pensé, dans la solitude même, avec plaisir que, par le moyen de ses oeuvres, il s’adressait à distance, il donnait une plus haute idée de lui, à ceux qui l’avaient méconnu ou froissé. Peut-être alors vécut-il seul, non par indifférence, mais par amour des autres, et (...) destinait-il son oeuvre à certains, comme un retour vers eux, où sans le revoir lui-même, on l’aimerait, on l’admirerait, on s’entretiendrait de lui; un renoncement n’est pas toujours total dès le début, quand nous le décidons avec notre âme ancienne et avant que par réaction il n’ait agi sur nous, qu’il s’agisse du renoncement d’un malade, d’un moine, d’un artiste, d’un héros. Mais s’il avait voulu produire en vue de quelques personnes, en produisant, lui avait vécu pour lui-même, loin de la société à laquelle il était indifférent; la pratique de la solitude lui en avait donné l’amour... (M.P.)
Extrait :
RépondreSupprimerCélèbre, Elstir ne l’était peut-être pas encore à cette époque tout à fait autant qu(...)'il le fut d’ailleurs bien peu d’années plus tard. (...) Mais un grand talent, même quand il n’est pas encore reconnu, provoque nécessairement quelques phénomènes d’admiration (...) Il prodigua pour moi une amabilité, qui était aussi supérieure à celle de Saint-Loup que celle-ci à l’affabilité d’un petit bourgeois. A côté de celle d’un grand artiste [Elstir], l’amabilité d’un grand seigneur [Saint-Loup], si charmante soit-elle, a l’air d’un jeu d’acteur, d’une simulation. Saint-Loup cherchait à plaire, Elstir aimait à donner, à se donner. Tout ce qu’il possédait, idées, oeuvres, et le reste qu’il comptait pour bien moins, il l’eût donné avec joie à quelqu’un qui l’eût compris. Mais faute d’une société supportable, il vivait dans un isolement, avec une sauvagerie que les gens du monde appelaient de la pose et de la mauvaise éducation, les pouvoirs publics un mauvais esprit, ses voisins, de la folie, sa famille de l’égoïsme et de l’orgueil.
Et sans doute les premiers temps avait-il pensé, dans la solitude même, avec plaisir que, par le moyen de ses oeuvres, il s’adressait à distance, il donnait une plus haute idée de lui, à ceux qui l’avaient méconnu ou froissé. Peut-être alors vécut-il seul, non par indifférence, mais par amour des autres, et (...) destinait-il son oeuvre à certains, comme un retour vers eux, où sans le revoir lui-même, on l’aimerait, on l’admirerait, on s’entretiendrait de lui; un renoncement n’est pas toujours total dès le début, quand nous le décidons avec notre âme ancienne et avant que par réaction il n’ait agi sur nous, qu’il s’agisse du renoncement d’un malade, d’un moine, d’un artiste, d’un héros. Mais s’il avait voulu produire en vue de quelques personnes, en produisant, lui avait vécu pour lui-même, loin de la société à laquelle il était indifférent; la pratique de la solitude lui en avait donné l’amour...
(M.P.)