Cependant un changement complet s'est insensiblement opéré en lui. Arraché aux occupations rustiques pour être jeté subitement dans le repos du corps et le travail de l'esprit, il sent tomber en même temps le cal formé sur ses mains et celui formé sur son âme. Ses membres se sont engourdis dans l'inaction ; son front basané s'est déteint à l'air des classes. Bientôt tout son corps s'amollit et s'adélicate ; le dur enfant de la campagne est devenu semblable à l'homme des villes, élevé sous verrines, et que tuerait une gelée blanche. Mais en même temps aussi, par compensation, son intelligence s'est développée ; elle a acquis des forces ; elle s'est assouplie dans l'exercice de la pensée ; son imagination enrichie a pris feu et a commencé à jeter des lueurs sur son cœur, dont il comprend mieux les mouvements et dont il analyse les désirs. La vie matérielle a cessé d'être tout pour lui ; son corps s'est amoindri, allégé, et son âme paraît à travers. Alors toutes les maladies de l'homme civilisé l'attaquent à la fois. Alors arrivent les douleurs vagues, le vide, ces tristesses sans nom et sans remède qui viennent on ne sait d'où, et font souhaiter la mort, on ne sait pourquoi. Les émotions, les désirs, les rêves trop pressés dans son cœur, y forment abcès tout-à-coup et font courir la fièvre dans toutes ses fibres.
(E.S.)
cf. écart, tellement...
(E.S.)
cf. écart, tellement...
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