N'en jetons presque plus ! Trions, reprenons, détournons.
L'essentiel est presque bien dit et redit, en long, en large...
Reprenons serré, de travers, à travers.
Par les moyens d'avenir du présent. Pour le présent de l'avenir.
(OTTO)KARL

> page d'accueil

2015-04-22

le cas où Vera nique...

Camille, passionné(e) par cette injonction à la maternité, enquête depuis des années sur la question, demandant aux mères pourquoi elles ont eu, voulu un enfant. Cela fera l’objet d’un prochain article mauvais esprit – il paraît que certaines mères ont répondu : « Par hasard » ou « par naïveté. »
En attendant, entretien avec la [scénariste de la BD « Et toi, quand est-ce que tu t’y mets ? » (éd. Fluide Glacial)] Véronique Cazot.

C. : À quel âge avez-vous réalisé que vous vouliez/ne vouliez pas d’enfants – et avez-vous réalisé que vous n’en vouliez pas alors que vous pensiez en vouloir... ou l’inverse ?
V.C. : Un peu avant 30 ans. Jusqu’à cet âge-là, je ne me posais pas vraiment la question, mais je pensais que je voulais des enfants, comme tout le monde. Je ne pensais même pas qu’une alternative soit possible.
J’imaginais un grand pique-nique au soleil avec mon beau mari et notre flopée d’enfants, comme lorsque je m’inventais des histoires, petite fille.

C. : À quelle occasion ? Une rencontre, une discussion, un bouquin, une remarque ?
V.C. : Bizarrement, c’est lorsque j’ai rencontré le premier homme avec lequel je me suis sentie vraiment bien et avec lequel j’ai pu être moi-même. La question de l’enfant s’est posée naturellement, et cette question m’a fait prendre conscience que j’avais le choix. Cela semble logique, mais ce n’est pas si évident lorsqu’il s’agit des questions qui impliquent les lois de mère nature.
J’ai su alors intimement et immédiatement que je ne voulais pas être mère. Par bonheur, mon compagnon a respecté ce choix, qui lui convient aussi.

C. : Trouvez-vous qu’il y a une forte pression sociale pour avoir des enfants ?
V.C. : La pression est énorme ! Surtout entre 30 et 40 ans, l’âge où tout le monde se lance dans la grande aventure familiale et vous encourage à plonger avec eux ! Toute la société est construite sur ce modèle unique. C’est le seul qu’elle reconnaît et qu’elle avantage moralement et socialement. Une femme normale veut FORCÉMENT des enfants. Sinon, c’est qu’elle a FORCÉMENT un problème.
Un couple équilibré qui s’aime veut FORCÉMENT des enfants. Si ce n’est pas le cas, c’est qu’il y a FORCÉMENT quelque chose qui cloche ou que le couple ne s’aime pas assez. Or, des tas de couples déséquilibrés ou qui ne s’aiment plus font des enfants et ont leur place dans la société.
Les filles sont conditionnées dès le plus jeune âge à devenir mère. C’est la fin heureuse de tous les contes de fée. Une promesse de bonheur qui me semble pourtant loin d’être évidente.
J’imagine à quel point les femmes qui voulaient, mais ne peuvent pas avoir d’enfant doivent se sentir inutiles et désespérées, car la société oublie de les rassurer sur le fait qu’on peut s’épanouir sans être mère et qu’un enfant ne garantit pas non plus une vie heureuse.

C. : Et vous, comment vivez-vous cette pression sociale ?
Je l’ai mal vécue les premières années car j’avais du mal à assumer mon choix. Je me sentais harcelée par la société et par mon entourage. Je souffrais de ne pas être comprise et me sentais de plus en plus anormale. Je m’indignais que l’on puisse juger ou imposer un choix aussi intime et important.
Je me sentais vraiment rejetée par la société. Depuis, ce rejet n’est plus du tout subi. Il incarne ma liberté et me protège de ce conformisme qui me semble enfermer tout le monde dans une illusion collective. Je trouve que la norme imposée par la société nous fait tous nous sentir anormaux à un moment ou à un autre et nous pousse à gommer nos différences jusqu’à ce que nous ne soyons plus nous-mêmes et ne réfléchissions plus par nous-mêmes. La norme me semble être la plus dangereuse des illusions.
Elle met la pression dans tous les domaines et pousse de nombreuses personnes à faire semblant. Se libérer de cette pression ne simplifie pas forcément la vie mais permet de vivre en accord avec soi. C’est déjà énorme !

C. : Pensez-vous que cette norme vous influence dans un sens ou dans l’autre ?
Elle a pu m’influencer quand j’étais plus jeune, lorsque je pensais encore qu’elle agissait pour mon bien et celui de tous, à l’image d’un parent responsable et aimant. Aujourd’hui, je sais beaucoup mieux que la société ce qui est bon pour moi et ce qui me convient.
Elle ne m’influence ni dans un sens ni dans un autre, car agir contre elle par simple esprit de contradiction ne me permettrait pas non plus d’être juste et bienveillante envers moi.
Mais je n’ignore pas son pouvoir et je le crains, car la pression sociale a de nombreux supers pouvoirs comme faire plier les plus faibles, rassurer les bons élèves, culpabiliser les brebis galeuses, frustrer les impuissants et radicaliser les rebelles (du pain bénit pour elle).

C. : Quel est votre genre ? Votre âge ? Où vivez-vous/avez-vous grandi ? Quelle est en gros votre profession/milieu social ?
J’ai 37 ans. Je suis auteur dans le milieu de l’audiovisuel et de l’édition et je partage ma vie entre la campagne normande et Paris. Je suis issue d’un milieu modeste, élevée par une mère au foyer et un père ouvrier.
Je pense évidemment que mon métier et mon mode de vie me facilitent la tâche. Une passion qui permet de trouver sa place et de s’épanouir peut donner la force de ne pas céder à la pression et de faire ses propres choix.

2015-04-20

Bruce Coolidge, même programme

En biologie et psychologie, l'effet Coolidge est le phénomène de performances sexuelles répétées d'un mâle lorsque de nouvelles partenaires sont disponibles, phénomène décrit expérimentalement en 1974.
Il a été constaté chez quasiment tous les mammifères et est attribué à une augmentation du niveau de dopamine, qui agit sur le système limbique.
Bien que l'effet Coolidge touche principalement les mâles, il a également été constaté, dans une moindre mesure, chez certaines femelles.

Protocole expérimental
Un rat mâle est placé dans une grande boîte avec environ 5 femelles en chaleur. Il commence alors à s'accoupler avec toutes les femelles, jusqu'à l'épuisement. Bien que les femelles continuent à se frotter à lui et à le lécher, il ne répond plus.
Toutefois, lorsqu'une nouvelle femelle entre dans la boîte, les sens du mâle se réveillent et il parvient à s'accoupler avec elle.

Chez les hommes
Après une relation sexuelle, les hommes connaissent une période post-éjaculatoire réfractaire. Ils ne peuvent recommencer immédiatement avec la même femme et ont besoin de temps pour retrouver toute leur vigueur. La période réfractaire est réduite ou inexistante si une nouvelle femme devient disponible.
Des biologistes évolutionnistes expliquent par l'effet Coolidge le fait que, plus que les femmes, les hommes désirent souvent avoir des relations avec des partenaires nombreuses et variées.

Origine de l'expression
L'anecdote voudrait que le président américain Calvin Coolidge et sa femme fussent en visite d'un élevage de volaille. Pendant la visite, Mme Coolidge demanda à l'agriculteur comment il arrivait à obtenir autant d'œufs fécondés avec aussi peu de coqs. L'agriculteur répondit fièrement que chaque coq accomplissait son devoir des dizaines de fois par jour.
« Expliquez cela à M. Coolidge ! » dit alors la première dame.
Le président demanda à l'agriculteur si chaque coq côchait la même poule à chaque fois.
« Non », répondit-il, « chaque coq dispose de nombreuses poules ».
« Expliquez cela à Mme Coolidge ! », répondit le président.



L'effet Bruce est une forme d'avortement chez les mammifères, lorsque l'exposition d'une femelle enceinte à un mâle inconnu provoque l'échec de la préimplantation ou de la postimplantation.
Cette interruption de grossesse a été constatée en laboratoire chez au moins 12 espèces de rongeurs. Les expériences menées consistent à mettre une femelle récemment fécondée en contact avec un nouveau mâle, ou son urine, ou son lit souillé. La femelle bloque alors l'implantation de ses embryons, ou les avorte, ou les réabsorbe. En fonction de l'espèce et des conditions expérimentales, l'interruption peut avoir lieu entre le moment de la conception et jusqu'à 17 jours ensuite.
L'effet Bruce a également été mis en évidence en conditions naturelles chez des primates, au sein de communautés de Gélada vivant dans le Parc national du Simien en Éthiopie.

Plusieurs hypothèses pourraient expliquer le phénomène :
    •    La femelle estime que le nouveau mâle est supérieur au précédent. En avortant, elle décide alors d'investir son temps et son énergie en s'accouplant avec le nouveau mâle, de façon à pourvoir sa progéniture des meilleurs gènes disponibles ;
    •    La femelle estime que le nouveau mâle risque de tuer la portée à venir. Elle a donc intérêt à avorter plutôt que d'investir son temps et son énergie en pure perte ;
    •    L'avortement profiterait uniquement au nouveau mâle, qui pourrait alors s'accoupler avec une femelle redevenue disponible après 1 à 4 jours. Richard Dawkins estime même que l'effet Bruce est entièrement une manipulation du mâle qui va à l'encontre de l'intérêt de la femelle, et que le comportement d'auto-avortement de la femelle fait partie du phénotype étendu des gènes du mâle.

> chapitre : PROGRAMME

2015-04-15

sans enfant : stars

Béatrice Dalle :
« Je n'ai jamais voulu d'enfant. Je ne voulais pas assumer la responsabilité de quelqu'un d'autre. Et puis tu prends perpète quand tu fais un enfant ! »



Arielle Dombasle :

« Je n'explique pas forcément ce choix, c'est une décision inconsciente. Je l'ai prise très tôt. Je voulais être éternelle petite fille, puis une éternelle jeune fille et j'ai toujours su que je serai une femme qui n'aurait pas d'enfants. »

Catherine Robbe-Grillet :
« Avoir l'impression d'avoir quelque chose qui grossit dans le ventre, ça m'épouvantait. Alors je suis pas une femme normale, je dois pas être une femme normale, puisque la plupart des femmes désirent avoir des enfants… Et d'ailleurs je dois avouer qu'en présence d'une femme très grosse, prête à accoucher, je suis pas à l'aise...  Alors, j'ai tort de le dire, hein, ça se dit pas, ce genre de choses, mais enfin, bon…
Et je sais pas pourquoi, je pourrais pas l'expliquer. J'ai des soeurs qui ont eu des enfants tout à fait normalement…
— Et vous, vous regrettez pas du tout de pas avoir eu d'enfant ?
— Non. Non, je regrette pas. Parce que… quand je vois autour de moi la façon dont ça se passe… C'est presque toujours difficile… Alors, il y a une conséquence chez moi : Comme j'ai pas eu d'enfant, j'ai pas eu de petits-enfants ni d'arrière-petits-enfants… je flotte dans l'âge. Je ne suis pas une arrière-grand-mère, j'ai jamais été une grand-mère, j'ai jamais été une mère… Donc, dans un certain sens, je n'ai pas d'âge. Je me sens comme « pas d'âge ». Parce que je n'ai pas suivi les étapes, normales. »


Liane Foly :

Elle raconte également qu'aujourd'hui, âgée de 51 ans, elle n'est pas triste de ne pas avoir d'enfants : « Mes copines disaient : "On va se marier, on va faire des mômes". Et elles en ont eu. Aujourd’hui, je suis célibataire, sans enfants. Le jour où j’ai découvert comme toutes les petites filles qu’on allait avoir mal tous les mois, ça m’a emm… Je disais à ma mère : "Pour quoi faire ? Moi, je m’en fous, je ne veux pas d’enfants !" J’ai mes neveux et mes nièces que j’adore et ça suffit. »

Valérie Lemercier :
— Vous avez été tentée par l’adoption dans votre vie?

V.L. : Jamais. Je ne me suis jamais sentie d’être une «vraie» mère, alors une «fausse»…  Si un enfant m’arrivait dans un petit panier, je le prendrais bien sûr et je m’en occuperais. Mais cela ne m’a jamais paru être vital.

— Pas vital, mais naturel quand même?

V.L. : Bien sûr. La situation normale est qu’une femme ait des enfants. Nous sommes nées pour perpétuer l’espèce et je serais mal placée pour dire le contraire : je viens d’une famille nombreuse, où du côté de mon père, comme du côté de ma mère ils étaient neuf. Et j’ai trois sœurs qui toutes ont eu des enfants.
— Mais pas vous...

V.L. : Je n’ai pas non plus tout fait pour. Et arrive un jour où c’est trop tard. Mais je ne considère pas ça comme un drame.

Eva Mendes :
« Je ne fais pas partie de ces filles qui rêvent de fonder une famille. »
« Je n’ai jamais eu le désir d’avoir des enfants. »

Elisabetta Canalis (32 ans) :
« Ça n’a jamais été un objectif pour moi. Mon instinct maternel est totalement satisfait par mes chiens. »

Jessica Biel :
« J'ai tellement d'amies qui se marient et font des bébés qui veulent m'entraîner avec elles. Elles veulent juste pouvoir m'embarquer avec elles à la crèche et tout le reste. Mais moi je crie "Nooooon !". Je résiste... »

Jacqueline Bisset :

« Je ne regrette pas de ne pas avoir eu d'enfant. Je me sens tout à fait en paix avec ça. (…) On ne peut pas tout avoir. »

Cameron Diaz (38 ans) :
« J’ai une vie géniale parce que je n’ai pas d’enfants. Avoir des enfants, ça change radicalement votre vie, et moi, j’adore la mienne telle qu’elle est. »
    (+ « Je crois que les femmes ont peur de dire qu’elles ne veulent pas d’enfants (…) J’ai plus d’amis qui n’ont pas que d’amis qui en ont. Et honnêtement ? On n’a pas besoin de plus d’enfants. Il y en a déjà beaucoup sur cette planète. »)

Lara Flynn Boyle (40 ans) :
« J'adore les enfants et les hommes mais je ne peux pas m'engager pour l'un ou l'autre pour le reste de ma vie. »

Véronique Cazot (39 ans) :
« J'aime bien les enfants, mais j'aime aussi cuisiner et c'est pas pour ça que j'ai envie d'ouvrir un resto. »

Renée Zellweger (42 ans) :
« Je veux simplement être indépendante et capable de prendre soin de moi. »
                   + Renée Zellweger, 44 ans, n'a pas d'enfants dans sa vie. Ou plutôt si, elle a ses neveux, qui lui suffisent amplement. (...) L'avantage, c'est qu'elle a la possibilité de les fuir quand bon lui semble ! Les enfants, « ce sont de mini-dictateurs », et être parent, « c'est être esclave », résume l'actrice.

George Clooney :
Ce n'est pas un scoop, George Clooney est allergique aux enfants,  « je ne serai jamais candidat au titre du père de l'année », jure-t-il. Le jour où les Jolie-Pitt sont venus lui rendre une petite visite avec leur smala dans sa villa italienne, il a cru devenir dingue au point, paraît-il, de les avoir bannis à jamais de remettre les pieds dans sa maison.

Georges Brassens :
— Ça ne vous manque pas de ne pas avoir de famille ? D'enfants qui grandissent autour ?
G.B. — Des enfants, non, mais j'ai une famille quand même ! Et j'ai beaucoup d'amis. Mais les enfants ne me manquent pas, non. Je pense que si j'avais eu des enfants, j'aurais été un peu gâteux, bien sûr, mais n'en ayant pas eu je n'en manque pas. Mais je préfère ne pas me continuer, je préfère que la dynastie s'arrête avec moi, parce que… je n'ai pas tellement confiance en l'avenir, voyez, je préfère ne pas me reproduire.

> au fond, brassens, c'est moi (1)

2015-04-11

n'être ou naître pas

[Amis, ils avaient] des terrains d’entente très profonds. (…) Il y a la même chose chez Beckett [que chez Cioran], ce refus de la naissance : il aurait mieux valu ne pas être né, c’est tout.
(S.B.)

san vou jecerè / néan / néan
mê jesuiné / voila / é enfan
(...)
é je suiné / néan / trevou
en vous appelant / papa / maman
comm' cèttanfan / êné / entrenou
(...)
devotrintérêt / jesui / jecê
javê riendemandé / jesui / céfê
(O.K.)

Maintenant que je suis là, au Programme... : faire avec, en jouer autant que se peut. Mais « être ou ne pas être » ne fait absolument pas question pour moi : n'être pas : n'avoir pas été.
(O.K.)

Le bien suprême, il t'est absolument inaccessible : c'est de ne pas être né, de ne pas être, de n'être rien.
(F.N.)


> de l'inconvénient-né

2015-04-08

non-père : non-coupable

On a connu plusieurs filles
Certaines voulaient faire de nous le père de leurs enfants
Mais nous on ne voulait pas
Ni s'accrocher à elles
Même quand elles étaient belles. (…)
On n'aura pas de descendance
On n' ira jamais promener nos familles le dimanche…
(A.M.)

N.D. : Vous n'avez jamais souhaité avoir un enfant, essayé de le convaincre ?
S.B. : Vous imaginez, un enfant avec Cioran !

… tous les crimes hormis celui d'être père.
(C.)

La procréation est un crime.
(L.L.)

Toi l'enfant que je n'ai pas eu
Au moins tu n'es pas mort
Tu n'auras pas vécu
Je n'aurai pas ce tort
(O.K.)

Mon fils, reste dans le néant
Je t'évite un aller-retour.
(F.)

2015-04-04

Others ; puis mother : baisée...

Florence Foresti, femme sans enfants, que ceux des autres :



Florence Foresti, sa grossesse, son accouchement :



Florence Foresti nouvellement mère (extrait de Mother Fucker) :



Florence Foresti, Mother Fucker (spectacle complet) :
>>>

2015-04-01

du surmenage maternel, honnêtement

... notre société actuelle véhicule l'image d'une parentalité remplie d'amour et de moments inoubliables, en laissant de côté l'absence de sommeil – qui peut s'apparenter à de la torture – ainsi que le poids des nouvelles responsabilités. Personnellement, je me souviens que la fatigue accumulée me laissait dans un état d'apathie extrême.
(J.R.)

Le burn-out maternel est le mal du siècle, nous disent les journaux. Les mères sont de plus en plus fatiguées, épuisées, au bout du rouleau. Tout le monde le sait. Ce sont vos amies, vos soeurs, vos cousines, vos mères, vos collègues de travail. Personne ne bouge. “Mais les hommes aussi sont touchés” me dit-on. Ah oui? Vraiment? Les 3% qui prennent un congé parental? Et le pire c’est qu’on est CONTENT que des hommes soient touchés, parce que ça veut dire qu’on AVANCE dans la répartition des tâches. Non mais vous vous rendez compte? On finit par SOUHAITER que des types soient mal, au bord de la dépression, à pleurer chaque jour de leur vie ou presque parce que ce serait signe de PROGRÈS SOCIAL. Miam le progrès.
Parmi ceux qui ne bougent pas, les pouvoirs publics tiennent le haut du pavé. Surme… quoi? Burn… quoi? D’abord la loi Toubon n’a-t-elle pas interdit les mots anglais? J’ai cherché sur le site de l’INPES (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé je rappelle) si ce mal insidieux avait fait l’objet d’une préoccupation étatique: RIEN. Faut dire, déjà qu’ils s’en tamponnent pas mal du surmenage au travail tant qu’il n’y a pas trop de suicidés alors pensez donc, aller se préoccuper du surmenage de celles qui ne travaillent MÊME PAS TOUJOURS!! En cherchant bien, on finit par dégoter un truc sur les troubles émotionnels et psychiques du post-partum. Comme si la question du surmenage maternel se résumait tout entière au post-partum immédiat. Vous avez accouché depuis plus de 6 mois? Bonne nouvelle, vous ne risquez plus rien! A la rigueur, notre ami Google nous sort deux trois trucs sur le surmenage des parents dont les enfants sont atteints de pathologies graves, diabètes, cancer, parce que eux quand même, ils ont de bonnes raisons de ne plus en pouvoir (ce qu’on imagine aisément, mais qui laisse quand même pas mal de monde sur le carreau).
Bon mais alors, je leur dis quoi moi aux copines qui du matin au soir se disent qu’elles doivent vraiment être complètement NULLES de ne pas s’en sortir avec leur nouveau-né hurlant, leurs bambins fiévreux, et toutes les petites galères du quotidien? De ne pas réussir à être la mère souriante, heureuse, épanouie, qu’on voit sur les magazines, qu’on nous vend dans les films et série TV, comme semble réussir à être la voisine, l’ancienne copine de fac, la grand mère, qui s’en sort(ai)ent si bien ELLES.
Je leur dis “implique leur père, tu ne les as pas fait seule ces enfants!”. Parce c’est pas faux (même si les familles monoparentales sont aussi une réalité par trop niée), parce que c’est la seule issue et que ça marche, parfois. Je dis seulement “parfois” oui, parce que c’est pas facile de remettre en cause des siècles de patriarcat en quelques générations, parce que ça bouscule, parce que c’est pas naturel et que se battre, déconstruire les habitudes et en changer, c’est pas simple quand on n’a déjà plus l’énergie de se lever le matin. Parce que les habitudes reviennent au galop, parce qu’on peut pas dire à une jeune mère “ton mec ne veut pas se lever la nuit? T’as qu’à le quitter”. Alors on tricote, on négocie, on concilie et ça évolue, doucement. Trop doucement au regard de l’urgence de l’épuisement. D’autres leur disent “t’avais qu’à pas faire de mômes”, et c’est pas faux. Mais c’est un peu facile aussi. Pas besoin de réfléchir au problème, pas besoin de compassion, d’empathie, d’intelligence. Pas besoin de changer, pas besoin d’inventer. Le “tavékapa” est une panacée universelle en matière de politique: Tavékapa arrêter l’école, tavékapa fumer, tavékapa manger au fast food, tavékapa vivre en ville, je vous passe le reste. Je milite pour que chacune puisse faire ses choix et soit respectée quelqu’ils soient, pour qu’on fiche enfin la paix à celles qui ne veulent pas d’enfant et qu’on ouvre les yeux sur le quotidien de celles qui ont décidé d’en faire.
Car je vous le dis bien fort: nous sommes des menteuses, des menteuses de mères en filles même!
Ma mère m’a menti, toutes les années où elle prétendu se moquer d’avoir le talon trop cuit du rosbeef, les biscuits éternellement cassés, où elle nous a donné sa glace sans sourciller parce que, finalement, on préférait le chocolat à la fraise. Toutes les années où elle a fini les assiettes tout en débarrassant la table parce qu’elle n’avait pas le temps de s’asseoir, les centaines de cafés réchauffés qu’elle a finalement bu froid parce qu’il le fallait bien. Son sourire quand mon père annonçait qu’il partait à l’autre bout du monde pour le boulot deux jours après en la laissant avec les mômes et les miasmes était un mensonge, son tendre empressement à repasser ses chemises et à les disposer dans la valise de façon à le prémunir d’une faute de goût aussi. Elle m’a caché ses larmes, ses crises de nerf, ses ras-le-bol, ses frustrations quand “prendre soin d’elle” était réduit à “aller aux réunions Weight Watchers” pour substituer à la tyrannie de ses enfants la tyrannie sociale, quand nous ne la laissions même pas déféquer en paix. Elle m’a menti chaque fois que je suis rentrée de l’école et que j’ai trouvé la maison propre, le repas chaud et appétissant sur la table, chaque fois que trempée de sueur dans l’insouciance d’une après-midi passée au grand air, j’ai trouvé un gâteau tiède et du jus de fruit frais sur la table du jardin. Elle m’a menti quand, pour avancer sur ses projets, elle devait consentir à des nuits blanches. Elle m’a menti chaque fois que mon père nous emmenait à la plage et où elle se disait tellement heureuse de pouvoir “mettre la maison au clair” en shampouinant les moquettes et lessivant les volets.
Moi aussi je suis une menteuse. Chaque fois que je n’ai pas n’osé dire combien de fois je me lève la nuit, combien de temps cela fait que je n’ai pas dormi d’une traite, combien de temps cela fait que je n’ai pas mangé chez moi assise de l’entrée au dessert. Chaque fois que je n’ai pas osé dire à quel point la grossesse peut être un moment pourri, à quel point on peut se sentir malade, diminuée, impuissante, terrorisée aussi. Chaque fois que je n’ai pas osé dire que oui, un nouveau-né tète tout le temps, chie tout le temps, et grandit lentement. Très lentement. Qu’un petit enfant c’est tout le temps malade, et qu’on s’inquiète, et que ça tombe jamais au bon moment. Qu’un tout petit enfant, ça a tellement de choses à apprendre et d’idées dans la tête que chaque minute, ça réclame trois cent choses. Qu’un petit enfant, c’est une bombe émotionnelle, qui pleure puissance mille, se réjouit puissance mille et que, bon gré mal gré, c’est au parent d’encaisser. Chaque fois que je m’enferme dans ma chambre pour crier fort dans un coussin (parce qu’il ne faut déranger personne) d’épuisement, de rage, de désespoir, chaque fois où j’ai supplié mon nouveau-né d’arrêter de pleurer, mon enfant d’arrêter de me solliciter, mon ado d’arrêter de m’envoyer bouler. Chaque fois que je me suis réfugiée dans les toilettes parce que c’était la seule pièce de la maison avec un verrou fiable. Chaque fois que j’ai fait semblant d’avancer sur mes projets professionnels alors que je n’avais ni le temps ni la disponibilité pour le faire sereinement et efficacement. Chaque fois qu’après avoir amené mon bébé chez la nounou, je me suis assise sur les marches de la cage d’escalier pour pleurer un bon coup en entendant ses hurlements derrière la porte, avant de commencer ma deuxième journée.
J’aimerais vous dire que je suis une exception, mais ce n’est pas vrai. J’aimerais vous dire que c’était un mauvais moment à passer, mais ce n’est pas vrai. Grattez sous le vernis de celles qui vous disent qu’elles ne voient pas de quoi je parle, examinez les cernes, les mâchoires tendues, les colères ravalées, vous verrez les mères épuisées.
Pourquoi suis-je une menteuse? Pourquoi sommes-nous toutes des menteuses? Parce que nous avons HONTE. Et pourquoi avons-nous honte? Parce qu’on nous a menti.
On nous a fait croire que...