N'en jetons presque plus ! Trions, reprenons, détournons.
L'essentiel est presque bien dit et redit, en long, en large...
Reprenons serré, de travers, à travers.
Par les moyens d'avenir du présent. Pour le présent de l'avenir.
(OTTO)KARL

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2010-02-19

premier esthèthe ?

Bien sûr, quelques classiques comme le Flaubert ou la Poésie de Stéphane Mallarmé, son premier livre, demeuraient lus par les étudiants, mais la structure de la pensée d'Albert Thibaudet, sa vision critique, était renvoyée aux oubliettes de l'histoire littéraire (...)
pour réapprendre à vivre la littérature sous l'œil précis et exalté d'Albert Thibaudet. (...)
Né le 1er avril 1874 (...) C'est en 1911 que tout se joue. Jusqu'alors régulier d'une grande revue, (...) Albert Thibaudet ne décolle pas du lot des critiques littéraires : il n'a pas d'œuvre, et l'étiquette de critique, si elle confine au raffinement pour certains, n'ouvre pas autant de portes que celle de poète, aussi médiocre soit-il par ailleurs... Le tout puissant André Gide avait été sensible à l'article que lui consacre Thibaudet, à propos de La Porte étroite en 1909, et il le fait entrer à la NRF, pour très vite lui confier le poste de Marcel Drouin qui tient plutôt mal que bien la « chronique de la littérature ». Dès mars 1912, Thibaudet en est titulaire, et il en fait ses « Réflexions sur la littérature » en 1914. Mais de 1911 date également la parution de son premier livre de critique littéraire, La Poésie de Stéphane Mallarmé (commencé en 1907), qui fait de lui, immédiatement, par la clarté de ses vues et la rigueur de son engagement pour le texte, une référence. (...) parce qu'il se concentre sur ce que dit le poète en tâchant — avec succès — de définir par la reconstruction pure la personnalité artistique et poétique du génie de Stéphane Mallarmé. (...)
« […] le style de Thibaudet, qui en a analysé tant d'autres, est inimitable, dans son mélange de rigueur et de détente, de précision et de fantaisie poétique, de sérieux et de gaieté qui ne nuit pas à la finesse. » (Jean-Yves Tadié, avant-propos à La Poésie de Stéphane Mallarmé d'Albert Thibaudet)
(...) Thibaudet est un des premiers, sinon le premier, à instaurer un rapport réellement critique aux textes et à fonder cette relation par l'analyse du style et des motifs littéraires. Par le style, il ne faut pas entendre qu'il étudie les différentes figures de rhétorique utilisées par son auteur en un gradus fastidieux, non, il développe une lecture globale par laquelle il montre quel est le style propre — le génie — de l'auteur, et cela dès 1922 avec son magistral Flaubert, dont une grande partie n'est que cela, la recherche de l'identité stylistique du maître de Croisset. Avant la « révolution » de la génétique, Thibaudet avait déjà compris que l'artiste se dévoile par le corps caché de son texte et que ce dévoilement recèle la part la plus intéressante des œuvres.

Et au-delà, encore, la recherche de Thibaudet vise, pas moins, à retrouver le sens des œuvres, à leur rendre leur vérité ontologique. L'étude stylistique doit (...) être — c'est de son temps, Paul Bourget et Henri Bordeaux étaient les grands auteurs d'alors et la psychologie régnait presque sans partage — une psychologie. Or, sous l'influence de Bergson notamment, Thibaudet ne va pas se limiter à la psychologie, il va s'efforcer de repérer les mots et les figures utilisés par son auteur pour en tirer un portrait en artiste et en créateur dont la vérité sourd des œuvres, manière à lui de se dire et de se cacher en même temps.

Enfin, Thibaudet n'exclut jamais l'artiste de son époque, mais il n'en fait pas pour autant le sujet de son temps ou de son environnement, comme Taine par exemple. L'artiste, chez Thibaudet, est libre et, à la fois, prend son essence dans un contexte générationnel. Ceux qui copient l'art de leur époque ne sont pas des artistes, ceci est à préciser. Mais ceux qui, répondant à leur génie propre, proposent des formes et des figures artistiques similaires ou proches de leurs contemporains. Il faut comprendre une exigence profonde qui forme sinon une école du moins une sensibilité de génération. (...)

D'Albert Thibaudet (...) il faut retenir (...) une compréhension du génie de chaque artiste comme part d'un mouvement qui l'englobe et dont il ne dépend pas forcément, car le concept de génération n'impose rien à l'artiste ni à l'œuvre, il pose un fait : ceux qui se posent les mêmes questions en même temps ne sont pas étrangers les uns aux autres. (...)
Une place rare et essentielle : celle d'une précurseur talentueux et simple...
(L.d.S.)

cf. esthéthique ®

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